LES RELIQUES
DE
LA PASSION DU CHRIST
Description
Il n'est pas vraiment possible de procéder à une description précise des reliques des Clous, étant donné que toutes leurs mesures n'ont pas été prises.
La relique des Clous est très difficile à étudier: de nombreux Clous ont été diffusés au cours du Moyen Age. Dans ces conditions, il est difficile de savoir lesquels sont authentiques.
Les copies
N'oublions pas, à côté des Clous authentiques qui ont servi lors de la Crucifixion du Christ, il y a des copies de Clous touchées aux Clous originaux au cours du Moyen Age.
Par exemple, d'après le témoignage de Richa,[1] pas moins de douze Clous ont été fac similés d'après un original: "Hic de duodecim clavis factus ab imperatore Constantino ex instigatione B. Helenae, ex uno clavo de tribus clavis DNJC, videlicet de illo distemperato immixto, cum tanto ferro ex quanto facti sunt XII clavi ad similitudinem XII apostolorum ex quibus hic est unus, qui fuit Napoleonis de Ursinis"...
Un Clou qui appartenait à Napoléon Ursini (cardinal Napoléon des Ursins, au 14ème siècle?) était l'un des douze qui avaient été fabriqués, à partir d’un des trois Clous originaux de Notre-Seigneur Jésus-Christ, sur l’ordre de l’empereur Constantin, à l’instigation de Sainte Hélène.
Au couvent degli Angeli de Florence au 15ème siècle, on retrouve une inscription "unus ex XII clavis", un des douze Clous.[2]
[1] Fleury C., Mémoire, p. 171.
[2] Idem, p. 175.
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Historique
Le premier témoignage que nous ayons de la relique des Clous est semble-t-il celui de Saint Jérôme (340-420) cité par Mély: "Clavos quoque quibus corpus Domini fuerat affixum, Helena portat ad filium. Ex quibus ille frenos composuit, quibus uteretur ad bellum et ex aliis galeam nihilominus belli usibus aptam fertur armasse". [1] En d'autres termes, Saint Jérôme nous apprend que Sainte Hélène apporta à son fils les Clous avec lesquels le Christ fut crucifié, qu'il plaça certains Clous dans son mors de cheval, qu'il utilisait pour guerroyer et qu'il en pourvut aussi son casque de guerre.
Un peu plus tard, Saint Grégoire de Tours (538-594) affirme aussi que c'est Sainte Hélène qui trouva les Clous, et il précise même que c'était après avoir retrouvé la Croix.[2]
Saint Jean Damascène, (676-749) dans son traité Contre les calomniateurs d’images, mentionne la relique des Clous.[3]
En 797, d'après Les grandes chroniques de France de Jules Viard, Charlemagne reçoit un Clou d'Irène de Constantinople. En 804, il offre cette relique à Aix-la-Chapelle.
Pour les reliques des Clous à Constantinople, on dispose des témoignages, au 13ème siècle, de Robert de Clari et de Nicolas d'Otrante. En 1203, Robert de Clari témoigne: «Si estoit li palais de Bouche de Lion…si y avoit bien trente chapeles. Et si y trouva on …les deux Clous qu’il eu fichiés parmi les mains et parmi les piés...»[4]Là se trouvait le Palais du Boucoleon…il comportait bien trente chapelles. Et là, on pouvait trouver les deux Clous qu’on lui mit aux mains et aux pieds. En 1204, Nicolas d'Otrante, fait mention du Clou, lors de la prise de Constantinople.[5]
En bref, ce que l'on peut dire, c'est que les Clous, originellement à Jérusalem, ont été déposés à Constantinople et Rome, et de là des originaux, des fragments et des copies ont été diffusés dans le monde chrétien. Par exemple le Clou conservé à Rome, a servi à produire des fac-similés: on en a fait des copies et on a mêlé à ces dernières un peu de limaille de fer de l'original romain. Cette pratique de mêler la limaille de fer à d'autres copies n'est pas le seul fait de la relique du Clou ; elle était connue aussi pour les reliques des chaînes de Saint Pierre par exemple.
On l'aura compris, retracer un historique précis et suivi de chaque relique des Clous est ici impossible. Tout au plus avons-nous ici des mentions historiques de l'existence de ces reliques, conservées ou diffusées ici ou là.
On peut néanmoins garder à l'esprit les reliques de Clous les plus renommées:
Selon Daniel Raffard de Brienne, le Clou actuellement conservé à Notre Dame de Paris est l'un des deux qui étaient à l'origine conservés à Constantinople, et mentionnés par Robert de Clari.[6]
Le fameux saint Mors de Carpentras, qui est devenu l'emblème de la ville au Moyen Age, est selon la tradition, celui-là même de Constantin que cite Saint Jérôme au 4ème siècle. Ce mors attesté au 7ème siècle, disparaît de Constantinople en 1204. On le retrouve à partir de 1225 dans la cathédrale de Carpentras. Actuellement il y est toujours conservé.[7]
Le Clou conservé dans la basilique Sainte-Croix de Jérusalem, à Rome, est celui qu'a apporté selon la tradition, Sainte Hélène.[8] Le Clou de Trèves est aussi une relique que Sainte Hélène, selon la tradition, a apportée. La pointe a été prélevée au cours du Moyen Age et donnée à Toul.[9]
Enfin la fameuse couronne de Monza, est pense-t-on un vestige du casque de Constantin dont parlait Saint Jérôme: « Elle comporte incrusté un cercle de fer fondu avec l'un des Clous de la crucifixion. D'après certains, le cercle de fer aurait été fait sur l'ordre de Sainte Hélène pour le casque ou la couronne de Constantin. »[10]
Culte
En 549, le culte des Clous de la Passion est reconnu par l’Église comme en atteste le diacre romain Rusticus dans sa Disputatio contra Acephalos.[11] En 553, lors du 5ème concile général et 2ème de Constantinople, le Pape Virgile prête serment au cours duquel il fait mention des reliques des Clous.[12]
Au milieu du 11ème siècle, l'ostension du Clou de la Couronne du Christ à l'abbaye de Saint-Denis est instaurée.[13]
Les Clous de la Crucifixion figurent parmi les reliques les plus vénérées à Constantinople, et sont mentionnés pas moins de dix fois avant 1204.[14]
Le 7 Février 1232 la relique du Clou est exposée à Paris, en l'église de Saint-Denis.[15]
Philippe V de France, dit le Long, né le 1291, mort en 1322, est guéri de la fièvre quarte en touchant le saint Clou.[16]
Vers la moitié du 14ème siècle, à Cologne, se déroule une procession annuelle en l’honneur d’un Clou.[17]
A Lagny, la relique du Clou était portée en procession le dimanche de la Passion fait remarquer Rohault de Fleury, sans préciser de date malheureusement.[18] Il poursuit en notant qu'à Laon l'abbaye Saint-Vincent avait instaurée une fête en l'honneur de la relique du Clou.
[1] Mély F., Exuviae, p. 81.
[2] Fleury C., Mémoire, p. 168.
[3] Saint Jean Damascène, Contre les calomniateurs d’images, Orat., III, 34.
[4] Castille D., Le saint Suaire, p. 126.
[5] Le Quéré F., Tunique, p. 17.
[6] R. de Brienne D., Dictionnaire, p. 49.
[7] R. de Brienne D., Dictionnaire, p. 49.
[8] Idem, p. 49.
[9] Fleury C., Mémoire, p. 180.
[10] R. de Brienne D., Dictionnaire, p. 49.
[11] Frolow A., 30. Voir Migne, PL, LXVII, col. 1229.
[12] Fleury C., Mémoire, p. 173.
[13] Hermann-Mascard N., Reliques des saints, p.210.
[14] Majeska G. P., article “The relics of Constantinople after 1204,” p.184, in Byzance.
[15] Fleury C., Mémoire, p. 177.
[16] Collin de Plancy J.A.S., Dictionnaire, tome I, p. XLV.
[17] Snoek G.J.C., Medieval Piety, p. 272.
[18] Fleury C., Mémoire, p. 176.