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Après avoir compris ce qu’est l’archéologie, ses buts et sa méthode d’investigation, il s’agit à présent de confronter nos connaissances aux reliques de la Passion, afin de pouvoir répondre à cette question.

 

 

2.1. Pourquoi étudie-t-on les reliques de la Passion

Cela peut être par simple curiosité, cela peut être aussi parce qu’au fond on essaye de découvrir ce qui ce cache derrière ces objets énigmatiques et mystérieux. Enfin, cela peut être aussi pour tenter de restituer un évènement historique à travers l’étude des lieux et des objets, un événement de la vie du Christ, celui de sa Passion, qu'il a vécue et soufferte à Jérusalem, vers l'an 33 environ...

C’est dans cette pensée que les reliques sont décrites dans l'ordre du déroulement de la Passion, telle qu’elle est décrite dans les évangiles.

 

Revivre le passé, le comprendre, en partant du Cénacle au Mont Sion, en marchant vers la colline de Gethsémani, pour faire ensuite une halte à la maison de Caïphe, puis se diriger vers la forteresse Antonia. De là, serpente le long et dur chemin vers le Golgotha que nous suivons, après avoir gravi péniblement le Mont du Calvaire. Nous voilà au sommet, contemplant l’emplacement de la Croix. Vient alors le moment de descendre dans la réalité du Sépulcre.  Dès lors, les reliques que nous étudions les unes après les autres, ne sont plus tant des artéfacts inertes et impersonnels catalogués sans raison ni sentiment que des objets évocateurs d’une histoire.

 

Ainsi il est indéniable que lorsqu’on se penche sur les reliques de la Passion, on restitue le vécu d’un homme, en réalisant une démarche que l’on peut véritablement qualifier d’archéologique. Rappelons-nous des mots de Jean-Marie Pesez, l’archéologie se veut être « la science du vécu des hommes, Â» celle qui « saisit la vie d’un instant passé en un lieu donné. Â»[1]

 

 

2.2. La méthode d’étude de l’archéologie applicable aux reliques de la Passion

Si l’on reprend point par point la méthode d’étude spécifique de l’archéologie que nous avons vue plus haut, nous ne pouvons que constater qu’elle peut être appliquée pour l’étude des reliques.

 

a) La définition d'objectifs

On peut agir avec les reliques de la Passion comme avec toutes les autres, de la même façon que pour des objets archéologiques et délimiter ainsi la période chronologique d'étude, la zone géographique d'étude, d'éventuels objectifs de synthèse, d'analyse, de critique, d'interprétation.

 

b) La collecte de données

Nous l’avons vu, la collecte de données est réalisée grâce Ã  l’apport d’informations obtenues en fouilles, par les recherches bibliographiques, tout en gardant à l’esprit l’importance du contexte archéologique qui ne doit pas être détaché des artéfacts qui lui sont rattachés: « L’étude des artéfacts ne saurait se passer de celle de leur contexte. L’artéfact est un témoin et un produit d’activités. Il faut donc étudier l’endroit sur lequel se sont déroulées ces activités, c’est-à-dire le site archéologique qui constitue une unité intermédiaire en analyse spatiale. Â»[2]

On peut procéder de la même façon avec les reliques de la Passion, en considérant du point de vue archéologique lieux saints et objets.

 

Notons qu’on peut trouver les res sacras dans un contexte archéologique du 1er siècle, à Jérusalem et dans ses environs, et dans un autre contexte archéologique, pendant la période médiévale en Occident et en Orient :

 

  • Reliques de la Passion dans le contexte du 1er siècle

Le contexte archéologique de cette époque, est celui de Jérusalem, avec le Cénacle, la zone de Gethsémani, le palais de Caïphe, étudiés par les archéologues, ainsi que certaines parties du niveau du 1er siècle, à l’emplacement de la forteresse Antonia.

On peut ajouter des visites sur le terrain, des principaux lieux de dépôt et d'utilisation des reliques au cours de la Passion, à défaut de fouilles archéologiques. Un voyage en Israël et dans les territoires palestiniens s'impose alors, particulièrement Jérusalem, pour avoir un aperçu de visu des lieux sans se contenter d'une vague approche par la lecture.

Pour bien faire, on pourrait aller sur tous les lieux où ont été diffusées ou déposées les reliques, mais cela bien évidemment, reste dans l'ordre de l'impossible, mais au moins Rome ne doit pas être écartée, en raison de la concentration de reliques de la Passion en son sein. Après, tout dépend de la relique que l'on se propose d'étudier dans le détail.

 

  • Reliques de la Passion dans le contexte médiéval

Il est possible de trouver encore des reliques de la Passion lors de fouilles archéologiques, datant d'une période postérieure à celle du 1er siècle, en particulier du Moyen Age, par exemple lors:

-de la mise au jour de vestiges de cimetières.

-d'églises.

-d'habitats.

 

Toutefois, Jean-Marie Pesez dans son ouvrage, L'archéologie,[3] fait remarquer à bon escient que « tous les témoins des civilisations passées ne sont pas enfouis dans le sol et ceux qui demeurent offerts à nos regards, plus ou moins mutilés en général, sont aussi l’affaire de l’archéologie. Â» En effet, en archéologie, si le contexte de fouilles est le plus propice à la découverte ou à l'étude des vestiges, les objets anciens retrouvés hors de leur contexte, ou mis au jour et conservés dans quelque Musée ou maisonnée, n'en perdent pas pour autant leur caractère d'objet archéologique.

 

c) La description des données

 

On peut procéder à une description des données collectées sur les  reliques de la Passion.

 

  • Les critères intrinsèques (forme, matière, couleur, mesures) constituent la rubrique Â« description Â» de chaque relique.

Les critères techniques, notamment les mesures, le matériau ou la technique de fabrication employée ne peuvent pas toujours être recensés pour certaines reliques, en raison de l'état parcellaire de l'objet d'étude et aussi plus simplement du manque d'informations.

 

  • Les critères extrinsèques du lieu de découverte et de période chronologique constituent la rubrique Â« localisation Â» et « historique. Â»

Dans le Guide des méthodes de l'archéologie, on peut encore lire que Â« les objets doivent être localisés dans l’espace et le temps de la meilleure manière possible et appartenir à un contexte archéologique. Â»[4] Pour répondre à cet impératif, que vouloir de mieux qu'une carte géographique? Il y a bien sûr des limites à cet emploi que nous avons énoncées plus haut, mais cela présente l'avantage d'avoir une vision d'ensemble immédiate. Celle-ci est complétée par la rubrique Â« localisation Â»: l'Å“il est tout d'abord attiré par la date croissante puis le lieu où est mentionnée la relique. Quant à la fonction de chaque relique au moment de la Passion, elle apparaît aisément lors de la description de chaque relique.

 

d) Le traitement des objets

 

Il consiste dans la quantification des objets ou fragments d'objets archéologiques :

  • en NMI, ou nombre minimum d’individus,

  • en NR ou nombre de restes,

  • et enfin en PR ou poids de restes.

 

Pour les reliques de la Passion, le NR est le plus indiqué même si on n'a pas la certitude que tel fragment du 9ème siècle de France par exemple, n'est pas celui que l'on retrouve en Italie au 12ème siècle. La situation est beaucoup moins simple que des objets archéologiques classiques, qui sont retrouvés de façon simultanée morcelés dans un même lieu. On peut alors les dénombrer sans risquer de se tromper. Quant au PR, il faudrait disposer de toutes les données complètes, ce qui n'est pas possible actuellement.

 

Voici un tableau synthétique réalisé d’après les données des annexes pour chaque relique. Il donne des informations sur le morcellement de chaque relique.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Tableau H.F. Morcellement des reliques de la Passion.

 

 

Le morcellement est inégal et ce pour différentes raisons :

 

Certaines reliques considérées comme très célèbres, sacrées et prestigieuses ont été très morcelées, l’exemple le plus frappant est à cet égard la relique de la Croix, diffusée dans le monde entier.

La Couronne d’épines a suivi le même sort, facilité par les épines d’une grande aisance de prélèvement par rapport à la Patène de la Cène par exemple, mais aussi parce que c’est un symbole de royauté.

A cet égard la Lance est comparable, morcelée mais aussi copiée voire faussée, tant le symbole est essentiel au Moyen Age.

 

A contrario, une relique peu morcelée n’est pas forcément considérée comme manquant de prestige, le Suaire de Turin est sur ce point, l’illustration la plus appropriée : non morcelée la relique a en revanche été très copiée au Moyen Age et ce jusqu’à nos jours. L’explication la plus probable est sans doute l’image de l’Homme du Suaire visible sur le linge.

 

Certaines reliques sont aussi peu morcelées en raison de la matière qui les compose : il est plus difficile de fragmenter un Calice qu’une Éponge.

 

En définitive, le morcellement des reliques a permis la diffusion et le culte de celles-ci dans un espace géographique beaucoup plus vaste.

 

 

 

 

 

[1] Pesez J.M., L’archéologie, p.69.

 

[2] Giligny F., « De la fouille à l’interprétation, le traitement des données, Â» in Demoule, Guide, p.159.

 

[3] Pesez J.M., L’archéologie, p.72.

 

[4] Giligny F., « De la fouille à l’interprétation: le traitement des données, Â» in Demoule, Guide, pp. 129-130.

 

 

 
 

2. Les reliques de la Passion correspondent-elles de par leur nature à des objets archéologiques?

 

 

 

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