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Vénération religieuse des reliques de la Passion par les laïcs

 

 


APPROPRIATION DES RELIQUES


Les laïcs pouvaient très bien posséder en propre des reliques de la Passion.

 

 

  1. Dans le monde oriental

 

Les premières sources faisant allusion à cette pratique datent de la 2ème moitié du 4ème siècle et début du 5ème siècle: il s’agit de Saint Grégoire de Nysse (394) évoquant un anneau contenant un fragment de la vraie Croix, que portait sa propre soeur.(25)


« La coutume de garder des reliques dans les demeures se constate également principalement en Orient, mais semble moins fréquente en Occident…A la fin du 4ème siècle, il semble tout à fait normal à Saint Augustin(26)que des reliques représentatives rapportées de Terre Sainte, principalement de la poussière ou des pierres prises près de Jérusalem, fussent gardées dans les maisons privées et parfois à la tête du lit afin que le possesseur fut protégé de tous les maux. »(27)


Des personnes du peuple pouvaient posséder des reliques de la Passion, mais surtout des princes et des membres de la Cour: c’est ainsi qu’à Constantinople, les empereurs ont toujours veillé depuis le 7ème siècle, à constituer un véritable trésor de reliques de la Passion, dont ils se servaient pour récompenser des membres de la cour, ou tout simplement faire des présents aux êtres proches.


 

 2.  Dans le monde occidental

 

L’apport de l’archéologie permet de dire que les reliques étaient bien présentes dans la vie des occidentaux, et ce bien plus souvent que ce que l’on pouvait penser puisque, comme le montre l’ouvrage de Brigitte Pitarakis, (28) on a pu retrouver de nombreuses croix–reliquaires pectorales dans les tombes des cimetières occidentaux, mais aussi dans des zones artisanales ou des zones d’habitat.


Mais ce seront surtout les seigneurs ou les princes qui disposeront plus largement des reliques: « à partir de la fin du 10ème siècle, l’abbaye royale ou comtale, même si le roi ou le comte a déposé le titre d’abbé, est tenue comme faisant partie du patrimoine de la famille souveraine. » (29) C’est ainsi que les princes et grands seigneurs peuvent faire transférer les reliques à leur guise, au lieu de leur choix.

 

Hermann-Mascard précise que « les princes peuvent être amenés à contrôler l’aliénation des reliques des sanctuaires situés sur leurs terres à deux titres: comme protecteurs des intérêts des églises, comme souverains désireux de conserver des biens aussi précieux sur leurs domaines... »(30)Toutefois, princes et seigneurs ne se contentent pas que de conserver les reliques, ils les portent aussi au cou, dans de petits reliquaires.(31)


Enfin, en ce qui concerne les monarques, loin de vouloir thésauriser à tout prix les reliques, ils peuvent en dispenser généreusement aux personnes de leur entourage, aux membres de la Cour, ou encore à des monastères, des églises…« Les diverses donations d’épines de la couronne du Christ dont Louis IX gratifia d’assez nombreuses églises et personnes, se justifient par le fait que ces reliques déposées à la Sainte Chapelle lui appartenaient en propre. »(32)


Le temps des croisades favorise aussi un apport de reliques aux particuliers sous la forme de bourses de reliques, « distribuées aux croisés après la prise de Constantinople en 1204, par les prélats chargés du trésor commun…»(33)


Jusqu’au début du 17ème siècle, l’appropriation individuelle de reliques, même insignes, et leur transmission héréditaire est acceptée sans trop de difficultés par le Saint-Siège. (34)

 


LE BAISEMENT ET LE PORT DE RELIQUES DE LA PASSION


Au 9ème siècle, le Pape Nicolas Ier (+867) approuve la pratique de baiser et de porter les croix-reliquaires, pourvu qu’on le fasse, en étant pur de corps et de coeur.(35)


Saint Thomas d’Aquin (+1274) ajoute (36) qu’il est permis à l’homme de suspendre à son cou des reliques des saints ou de les porter de quelque façon que ce soit, pour sa protection, et qu’une telle pratique ne peut être considérée comme illicite, du moment que l’on porte les reliques, plein de confiance et de foi en Dieu et en ses saints: « Sed reliquias sanctorum licet homini collo suspendere vel qualitercumque portare, ad suam protectionem »… « Quia si portentur ex fiducia Dei et sanctorum, quorum sunt reliquiae, non erit illicitum. » (37)

 

 

 

 

(25) Hermann-Mascard N., Reliques des saints, p. 316.
(26) Saint Augustin, De civitate Dei, LXXII, c 8, dans PL, XLI, col. 764.
(27)Hermann-Mascard N., Reliques des saints, p. 318.

(28) Pitarakis B., Les croix-reliquaires pectorales byzantines en bronze. Cet ouvrage est un recueil de croix-reliquaires trouvées lors de fouilles archéologiques de cimetières mais aussi de zones artisanales ou d’habitat.

(29) Hermann-Mascard N., Reliques des saints, p. 332.
(30) Idem, p. 332.
(31) Ibidem, p. 317.
(32)  Ibidem, p. 334.
(33)  Ibidem, p. 322.
(34) Ibidem, p. 328.
(35) Snoek G.J.C., Medieval Piety, p. 89.
(36) Saint Thomas d’Aquin, Somme théologique, II, II, 4, q.96, art. 4,3

(37) Idem, II, II, 4, q.96, art.4, 4.

 

 

 

Utilisation religieuse (2)

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